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ADO SATO ...

C'est un petit tableau de 60 cm de longueur. Je m'en suis servi depuis vingt cinq ans. Vous m'avez demandé ce qu'il représente et vous attendez une réponse. C'est que vous êtes mal éduqué. Vous êtes-vous demandé une seule fois ce que vous représentiez vous-même? Ne sentez-vous pas que les réponses ne nous apprennent rien, qu'elles mentent au profit de quelques trafics d'influence?

Sur un fond bleu avec une touche de magenta une mire couleur de photographe occupe le bas du tableau. Un chevalet noir se dresse, porte un cadre noir et dans ce cadre une sorte de paysage en négatif noir et blanc. On devine qu'il ya des arbres mais aussi quelque bâtiment d'extrême-orient. Aucune indication de lieu. Tout est donc fait pour qu'on ne se soucie ni de l'endroit ni des circonstances. Les couleurs sont dans la mire, n'existent que par allusion à on ne sait quel travail sur l'image. Les lumières sont réduites aux contrastes de blancs et de noirs, les températures au contenu de la mire. Nous voilà très loin des paysages fleuris où on met les pieds avant d'ouvrir les yeux.

 

Ce petit tableau , qui reste un paysage, mélange les deux univers de la peinture et de la photographie comme pour dire que de toutes façons notre regard est composite, qu'il fonctionne comme si nous parlions une langue avec plusieurs grammaires, que rien n'est moins naturel que le regard et qu'il n'y a pas d'images de la Vérité. S'il vous reste deux sous d'attention vous remarquerez que tout échappe à la symétrie dans ce tableau, jusque dans les petits détails, qu'il tient l'exact équilibre entre l'ordre et le désordre, entre la matière et l'esprit. Ca le fait coupant comme de l'acier. Cette position du regard nous protège indéfiniment des menteurs et des minables.

Avril 1979. ADO. Paris.  

 

 
 
 
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